mercredi 27 janvier 2010

La compréhension des concepts (fin)

L'explication des concepts pour chaque discipline est illusoire dans le temps imparti et ce rôle reste dévolu à chaque intervenant dans sa discipline privilégiée.

Il reste cependant possible, en un nombre d'heures restreint et dans les chapitres suivants, de brosser un panorama de l'avancée de la science qui ne se fait ni en ligne droite, ni continûment (rupture épistémologique) et qui marche parfois à reculons quand une génération entière de savants est décimée par une guerre. Les facteurs d'avancée sont rationnels, liée aux méthodes (Descartes, Bernard, Bachelard), mais aussi irrationnels liés aux passions, au talent de persuasion du savant et au contexte socio‑politico‑économico‑religieux du moment (Galilée, Pasteur, Darwin)... Le hasard joue aussi son rôle bien qu'il ne favorise que les esprits préparés, déjà en recherche sur une idée (Pasteur). Les obstacles épistémologiques, la validité des preuves et les erreurs seront analysés pour expliquer l'apparition de controverses tenaces et pour faire ressortir quelques grands traits du comportement humain face à l'acquisition de connaissances. Il s'agit de Connaissance et non de Vérité car cette dernière semble fluctuer d'un cadre conceptuel à un autre.

La construction des concepts est indissociable de la délimitation de leur champ d'application. Il faut donc introduire dans l'enseignement des théories fausses qui permettent par leur critique de circonscrire les domaines d'applicabilité des concepts. L'examen critique et la décision raisonnée de la validité des idées devraient être largement encouragés car très instructif. En effet, la réfutation des théories erronées fait appel à des savoirs divers et à leur coordination.

Un exemple de concept erroné est celui qui a constitué la base de la théorie de la gravitation de Lesage (XVIII ème siècle). L'action à distance, prônée par Newton, ne le satisfaisant pas, Lesage imagina que les corps célestes étaient constamment bombardés de particules. Si deux corps sont relativement proches, ils se font mutuellement écran et la proportion de particules atteignant les corps est beaucoup plus forte sur les faces qui ne sont pas en vis à vis. Les corps sont donc poussés l'un vers l'autre plutôt qu'attirés. Cette théorie avait au moins le mérite d'offrir un repos bien mérité aux anges qui jusqu'alors donnaient leur impulsion aux planètes. Cette théorie est cohérente et de nombreux auteurs ont donné des arguments de réfutation non valables. Par exemple Feynman (1980, « Nature de la physique », Seuil, Points sciences) : « Si la terre est attirée, elle avance et à l'avant, elle sera percutée par plus de particules qu'à l'arrière. Il y aura freinage et le mouvement ne pourra se perpétuer aussi longtemps qu'observé. » L'argument ainsi explicité dépend des vitesses respectives du corps et des particules pour déterminer le freinage et présenté sous cette forme n'est guère convaincant. Seul, Poincaré parviendra à trouver l'argument subtil mais décisif quelques deux siècles après Lesage. La réfutation d'une théorie cohérente mais fausse n'est donc pas évidente. Elle tient ici à la détermination du champ de validité de deux concepts antagonistes : l'action à distance et l'action par contact.

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