mardi 19 janvier 2010

La compréhension des concepts scientifiques

L'enseignement de l'histoire des sciences, quand il existe, est souvent classé dans la rubrique « culture générale », en tant qu'appoint philosophique à l'enseignement scientifique. Cette vision risque de cantonner, encore pour un certain temps, cette discipline dans les matières optionnelles.

L'histoire des sciences est pourtant essentielle au moins dans les deux cas suivants :

‑ Elle permet d'apporter du sens à la science en expliquant l'éclosion des concepts, ce qui a poussé le chercheur a inventé ce concept, dans quel cadre il est utile et hors de quel domaine de validité il serait dangereux de l'appliquer. Dans un enseignement dispensé comme une profession de foi où les concepts, les principes et les formules tombent souvent du ciel, sans questionnement préalable, la croyance serait remplacée par la compréhension.

G.Bachelard dans "La formation d'un esprit scientifique", dit fort justement à ce propos : « Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on dise, dans la vie scientifique, les problèmes ne se posent pas d'eux‑mêmes. C'est précisément ce sens du problème qui donne la marque du véritable esprit scientifique. Pour un esprit scientifique, toute connaissance est une réponse à une question. S'il n y a pas eu de question, il ne peut y avoir connaissance scientifique. Rien ne va de soi. Rien n'est donné. Tout est construit. »
‑ L'histoire permet également de comprendre pourquoi... on ne comprend pas. L'analyse des erreurs passées évitent normalement de les reproduire et savoir comment les anciens ont surmonté les obstacles épistémologiques est riche d'enseignement pour la formation d'un esprit innovant. Ceci sera illustré dans la partie consacrée à la logique de l'erreur.

Mais revenons au problème du questionnement préalable et de l'explication des concepts, avec pour illustration un petit exemple vécu. Dans les années 70, les cours de physique pour débutants (et j'étais une débutante particulièrement motivée) commençaient par de la mécanique, matière qui paraissait peut‑être plus proche de l'expérience sensible que l'électromagnétisme. L'étude des forces nous amenait à différencier le poids P = mg, de la force inertielle F = my. Présentées sous cette forme, les formules sont très analogues et il ne faisait aucun doute pour moi que « m » représentait le même concept dans les deux cas. Quelle ne fût pas ma surprise quand on nous annonça le principe d'équivalence entre masse inertielle et masse pesante! Apparaissaient alors sans crier gare, deux masses distinctes qui s'annihilaient instantanément puisqu'équivalentes. Mon malaise, devant ce principe tombé du ciel, reflétait en fait un dysfonctionnement fréquent de l'enseignement scientifique : donner une réponse à une question qui n'existe pas dans la tête de l'élève et parfois dans celle du professeur. Cette analyse, bien sûr, je ne l'ai faite que bien plus tard et ma motivation sur le moment m'a permis de garder foi en la science et c'est bien le terme qui convient en cette occurrence ...

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