mercredi 26 mai 2010

Les passions du savoir

Ce titre évocateur est emprunté à P. Thuillier (THUILLIER P. « Les passions du savoir. Essais sur les dimensions culturelles de la science », 1988, Fayard).
La dimension humaine, faite de sentiments, de passions et d'irrationnel, interfère de manière bénéfique ou non avec la vie des théories (acceptation ou rejet) et intervient également dans la phase d'inspiration du chercheur en quête d'idées nouvelles.

Pour illustrer le rôle bénéfique de la psychologie dans l'acceptation de théories importantes nous prendrons l'exemple de Galilée et de Pasteur, figures hautement symboliques de la Science. Néanmoins, la reconnaissance de leurs idées doit beaucoup à leur talent de persuasion (ce furent en effet tous deux de grands orateurs), à la puissance de leur séduction et également au climat socio-­économique de leur temps.
Dans ce sens, nous citerons deux extraits de « Contre la méthode » de P. Feyerabend, le premier justifiant, de manière générale, le rôle de l'irrationnel, le second ayant trait à un cas particulier, celui de Galilée :
1- « Il est clair que l'attachement aux idées nouvelles devra être provoqué par d'autres moyens que des arguments. Par des moyens irrationnels tels que la propagande, l'émotion, les hypothèses ad hoc et l'appel à des préjugés de toutes sortes. Nous avons besoin de ces moyens irrationnels pour soutenir ce qui n'est qu'une foi aveugle jusqu'à ce que nous ayons trouvé les sciences auxiliaires, les faits, les arguments qui transforment cette foi en connaissance solide. »
2- « Pour vérifier Copernic, il faut une conception du monde entièrement nouvelle, y compris une nouvelle conception de l'homme et de ses capacités à connaître. (...) Certains phénomènes observés au télescope sont manifestement coperniciens. Galilée présente ces phénomènes comme des preuves indépendantes en faveur de Copernic. Mais, le fait est plutôt, qu'une conception réfutée - le Copernicianisme ‑ présente une certaine ressemblance avec des phénomènes émergeant d'une autre conception également réfutée ‑ l'idée que les phénomènes télescopiques sont des images fidèles du ciel. Galilée l'emporte grâce à son style, à la subtilité de son art de persuasion, il l'emporte parce qu'il écrit en italien et non en latin, enfin parce qu'il attire ceux qui, par tempérament, sont opposés aux idées anciennes et aux principes d'enseignement qui y sont attachés. (...) Copernic est le symbole des idéaux d'une nouvelle classe qui tourne ses regards vers le passé classique de Platon et de Cicéron et vers l'avenir d'une société libre et pluraliste. (...) Galilée exploite la situation et il renforce ses positions par ces astuces, ces mots d'esprit et ces non sequitur dont il a le secret. »

Voici quelques exemples de théories qui furent imposées par la passion, la vanité, l'entêtement malgré des preuves tangibles pouvant constituer une réfutation à l'époque de leur élaboration : la théorie de la gravitation de Newton, le modèle atomique de Bohr, la relativité restreinte et générale d'Einstein... Ces théories bien que non validées complètement, mais quelle théorie le serait en fait, ont été adoptées aussi pour leur utilité dans la résolution de nombreux problèmes.

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