jeudi 13 mai 2010

Les Controverses

Les difficultés d'évaluation d'une théorie conditionnent l'apparition de controverses au sein de la communauté scientifique. Parmi les plus célèbres, comptons celles ayant trait à l'évolution des espèces (Darwin, Lamarck), à la nature de la lumière (onde, corpuscule), à l'origine des micro‑organismes (Pasteur, Pouchet), à la formation des continents et des océans (dérive et ponts continentaux) ou aux mouvements respectifs de la Terre et du Soleil (Galilée, Eglise).

Chaque controverse illustre un ensemble de difficultés à chaque fois différentes :

1- La théorie de l'évolution des espèces a tout d'abord dû surmonter une première controverse celle du créationnisme soutenant que le monde a été créé tel qu'on peut le voir actuellement. Cette controverse dure toujours puisque certains états des USA exigent l'enseignement, en parallèle, des deux théories à l'école.
L'évolution étant acceptée par la majorité des scientifiques dès le XIX ème siècle, restaient les problèmes liés aux mécanismes biologiques responsables de celle‑ci. Deux thèses s'affrontent, celle de Darwin qui supposent des mutations aléatoires et une sélection naturelle des plus adaptés à l'environnement et celle de Lamarck qui tient pour l'hérédité des caractères acquis par l'individu au cours de sa vie. La controverse est en fait apparue après la mort des deux savants par l'excès de zèle de leurs disciples. Ces derniers ont radicalisé la pensée initiale des deux hommes.

En fait, Darwin, s'étant largement inspiré des travaux de Lamarck, n'était pas contre l'idée de l'existence de phénomènes autres que la sélection du plus fort pour expliquer l'évolution. Ainsi, tente‑t‑il de le démontrer dans un de ses derniers ouvrages « La descendance de l'homme » que certains de ses disciples mettront au compte d'une divagation sénile.
Les nuances de la théorie de Darwin ont été éliminées pour pouvoir mieux imposer sa théorie et nier l'apport de Lamarck, ce français hérétique. Cette position a été confortée par les nouvelles découvertes de la biologie moléculaire qui abondait dans le sens d'un patrimoine génétique non influençable par l'environnement. Des travaux récents sont cependant beaucoup plus nuancés :

‑ Mise en évidence de gènes 'sauteurs' sous l'influence du milieu par B. Mc . Clintock, en 1940, et dont les travaux n'ont été reconnus que dans les années 80.
‑ Existence d'un ADN en dehors du noyau cellulaire dans les mitochondries et les chloroplastes (organites, peut‑être d'origine bactérienne, qui servent à la respiration de la cellule). Cet ADN est influencé par le cytoplasme et échange des brins avec l'ADN du noyau au moment de la mitose.
‑ Existence de virus capables de transformer leur ARN en ADN et de s'installer dans le matériel génétique d'un individu, avec aussi transport possible de gènes entre espèces.
Les interactions ADN‑milieu sont donc possibles. Lamarck, n'avait sans doute pas tout à fait tort.

2- Dans l'exemple de la théorie de la lumière, la controverse n'est pas venue de disciples trop zélés mais tient à la nature même de la lumière. Le concept de dualité onde‑corpuscule n'a été admis qu'au XXème siècle grâce à la mécanique quantique, élargi même à la matière par De Broglie (1924). Avant cette période, l'opposition est née entre les tenants d'une lumière particulaire (de Newton à Einstein) et ceux d'une lumière ondulatoire (Young, Fresnel, ... ), car les expériences révélaient tour à tour un seul des aspects de la nature de la lumière. Ce type de malentendu est assez fréquent en science. Chaque école de pensée développe son point de vue alors que bien souvent les phénomènes étudiés relèvent de plusieurs explications alors complémentaires. L'exemple de la lumière est en ce sens tout à fait pédagogique et celui de l'évolution, décrit plus haut, le deviendra sans doute.
Une parabole attribuée à Bouddha vient ici à point nommé : « Ayant fait convoqué des aveugles, leur rajah les mena auprès d'un éléphant. A l'un, il présenta une défense, à l'autre une oreille, au troisième la queue et au dernier un pied. A chacun, il dit : 'Voici l'éléphant'. Il leur demanda ensuite : 'Avez‑vous étudié l'éléphant? ‑ Oui, Majesté' répondirent‑ils. 'Alors, quelles sont vos conclusions ?'. Les aveugles répondirent à tour de rôle: 'l'éléphant est une sorte de pointe ‑ Non, l'éléphant est comme un éventail ‑ Non, l'éléphant est un genre de corde ‑ Non, l'éléphant est une espèce de tronc d'arbre. »

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